En 2020, Supergiant Games nous gâtait de l’excellent rogue-lite Hades premier du nom, encensé par la critique et le public. Le 6 mai 2024, le talentueux studio indépendant sortait sans crier gare la toute première suite de son histoire en accès anticipé : Hades 2. Rien que dans cette forme précoce, le titre offrait déjà un contenu encore plus titanesque que son aîné, et n’a fait que se bonifier au fil des mois qui ont suivi. Le 25 septembre 2025, il sortait enfin en version finale, pour l’heure uniquement sur PC, Nintendo Switch et Nintendo Switch 2. Après avoir tué le Temps lui-même maintes nuits durant, il est donc l’heure de rendre notre verdict, et voir si l’aventure de Mélinoé mérite bien sa place au panthéon des plus grands rogue-lite, voire même au-delà.
Au fil des mises à jour majeures consécutives de l’accès anticipé d’Hades 2, je relançais régulièrement avec plaisir quelques runs en compagnie de Mélinoé. J’avais donc déjà largement exploré tout ce que cette version précoce du jeu avait à offrir. Mais sa sortie en version finale a ajouté encore plus de nouveautés, dont le fin mot de cette histoire homérique. Celle-ci a cependant impliqué un long périple, mais je tenais à arriver au bout de l’aventure avant de rendre le test le plus complet possible pour ce rogue-lite d’exception. Même si cela a demandé un labeur plus harassant que prévu, voici donc mon avis définitif sur ce qui s’avère bel et bien comme le digne héritier d’Hades premier du nom, et même plus encore.
Hades 2 : une suite titanesque qui a de quoi faire rougir Zagreus
Puisque près d’un an et demi séparent l’accès anticipé d’Hades 2 et sa version finale, vous connaissez probablement déjà l’Odyssée que nous propose Supergiant Games en compagnie de la petite sœur de Zagreus. Au cas où, rappelons brièvement l’histoire du jeu : le Titan Cronos, l’incarnation du Temps lui-même, a réussi à se libérer de la prison créée par ses enfants et a pris d’assaut les Enfers en faisant prisonnier Hadès et sa famille. Il fomente maintenant un sinistre plan pour se venger de l’Olympe et ses habitants. La sorcière Hécate, entre autres, a toutefois réussi à s’échapper, et avec elle Mélinoé, fille d'Hadès tout juste née. Toutes deux se réfugièrent alors à la Croisée, pour entraîner la sœur de Zagreus afin, qu’un jour, elle puisse terrasser son grand-père et sauver l’ensemble du panthéon grec.
Quand on lance le jeu pour la première fois, on rentre in media res dans l’action, qui reprend dans les grandes lignes la formule rogue-lite en vue isométrique du premier épisode. On commence alors aux commandes d’une Mélinoé armée seulement d’un bâton de magicienne, et qui ne connaît pas encore pleinement la tâche olympienne qui l’attend. Malgré tout, rien qu’à la première « run » du jeu, on constate déjà de belles améliorations au niveau du gameplay de base par rapport à son aîné. Si on retrouve bien les classiques Attaque, Technique, Lancer (remplacé ici par un Glyphe à poser au sol), et Esquive, chaque touche dispose en plus d’une forme chargée, ou d’un sprint concernant l’esquive. On peut ainsi dire que les commandes, malgré tout très simples à appréhender, sont doublement plus complètes que sur Hades. L’action gagne ainsi grandement en dynamisme et en implication du joueur, qui dispose de plus de cordes à son arc.

Naturellement, les Bienfaits des dieux pour renforcer notre personnage au fil d’une run sont également de retour dans Hades 2, avec cette fois 12 divinités qui nous viennent en aide, au lieu de 10 dans le premier. Cela offre énormément de combinaisons possibles pour gagner en puissance et avoir une chance de terminer la partie en cours. Selon l’efficacité du build de Mélinoé et votre maîtrise des mécaniques du jeu, une run peut ainsi grossièrement prendre entre 10 et 40 minutes. La fille d'Hadès aura en tout cas besoin de tout le soutien possible pour accomplir sa quête. En plus de devoir bouter son grand-père des Enfers, seul terrain de jeu de son aîné, sa suite en ajoute en effet un second : la Surface, qui va nous mener de son côté jusqu’au Mont Olympe, foyer des dieux. Cela implique donc encore un contenu littéralement doublé par rapport au précédent titre. La Surface comme les Enfers comptent par ailleurs quatre « régions », avec au bout de chacune un Gardien, ou boss, qui promettent des duels absolument épiques. Ce qui signifie donc huit boss en tout, contre quatre sur le premier (sans parler bien sûr de leurs versions améliorées). Hades 2 porte ainsi définitivement bien son nom, puisqu’il propose littéralement deux fois plus de choses à faire. Supergiant Games a ainsi fait preuve d’une générosité folle pour cette suite, peut-être quelque part à ses dépends, mais j’y reviendrai.

Enchaîner les sessions d’Hades 2 est quoi qu’il en soit un pur plaisir tant le gameplay est d’une précision chirurgicale et la montée en puissance de Mélinoé au fil d’une partie est jouissive. On peut cela dit reprocher sur les derniers tronçons d’une run un certain manque de lisibilité tellement il peut y avoir d’ennemis et d’effets à l’écran. En parlant d’effets visuels, impossible également de ne pas rester béat devant la direction artistique du jeu, véritablement à se damner. Même constat pour la bande-son juste divine, de nouveau orchestrée avec brio par Darren Korb. Comble du bonheur, le jeu est très peu gourmand et tourne donc à merveille tant sur PC que sur Nintendo Switch et Nintendo Switch 2 ou d’autres appareils hybrides comme le Steam Deck. Le format rogue-lite est d’ailleurs parfait pour de tels appareils nomades.

Un Rogue-lite vraiment God-like qui tue (un peu trop ?) bien le Temps
Malgré les réflexes les plus acérés et la meilleure volonté du monde, les premières parties d’Hades 2 risquent très certainement de se solder par un échec. En sa qualité de rogue-lite, c’est tout à fait normal et fait même entièrement partie de l’expérience. Mélinoé va alors se téléporter à la Croisée, qui fait office de hub central. Là-bas, on a droit à une multitude d’activités. On pourra notamment, comme dans le premier volet, interagir avec un impressionnant casting de personnages secondaires, qui plus est portés par un casting vocal de haute volée (mais uniquement en anglais), et se lier d’amitié avec certains d’entre eux, voire plus si affinité. Ce à travers de nombreux dialogues, en leur offrant des présents ; ou encore en s'adonnant à une session de pêche ou en prenant un bain aux sources chaudes. Offrir des présents aux dieux nous permet également de récupérer des breloques de leur part, une mécanique déjà présente dans le premier jeu. On pourra ensuite les activer dans nos futures runs pour obtenir de puissants bonus ou s’assurer d’avoir les bons Bienfaits au bon moment, ce qui ajoute un côté stratégique bienvenu pour builder Mélinoé selon nos besoins ou envies.

En plus de développer nos relations avec tous ces personnages secondaires, Hades 2 se la joue Animal Crossing ou Stardew Valley, puisqu’il sera également possible de cultiver des plantes ; décorer la Croisée ; ou encore adopter des animaux (au nombre de cinq) qui pourront ensuite venir se battre à nos côtés. On peut de plus améliorer leurs statistiques et même changer leur apparence. Tout ceci fait partie intégrante de ce qu’on appelle dans un rogue-lite la « méta-progression », qui permet de débloquer des améliorations permanentes visant à rendre Mélinoé encore plus puissante au fil du temps. On pourra par exemple invoquer des structures comme des fontaines de soin qui pourront nous aider dans nos prochaines runs ; obtenir des cartes d’Arcane à activer pour obtenir d’importants bonus passifs ; accéder à des outils pour récupérer diverses ressources durant nos expéditions ; et enfin éveiller une large panoplie d’armes. Chaque arme dispose en prime de trois aspects supplémentaires, avec des effets uniques qui changent radicalement la manière de les employer.

Il y a donc définitivement de quoi s’occuper dans Hades 2, qui jouit d’une très grande diversité dans ce qu’il propose, au point presque de nous donner le tournis. À noter cependant que tous ces éléments à débloquer arriveront progressivement en fonction de nos résultats au fil de notre aventure. Il va donc falloir enchaîner énormément de parties avant de venir à bout de ce contenu colossal. D’autant que certains éléments ne se débloquent qu’avec une bonne part d’aléatoire, ce qui peut hélas s’avérer parfois frustrant. Surtout quand on cherche une amélioration spécifique qui ne veut pas arriver. Vient alors s’installer une certaine lassitude quand le jeu nous résiste et refuse d’offrir ce qu’on attend de lui.
Même constat pour la réalisation de quêtes secondaires en lien avec certains personnages secondaires, répertoriées dans la Liste des Moires. Celles-ci présentent des objectifs parfois un brin cryptiques, et il n’est alors pas évident de savoir quoi faire pour les terminer. Là encore, les choses finissent par se décanter, mais ça peut arriver extrêmement tard. Ce qui peut donc impliquer plusieurs parties « à vide », si on a déjà bien avancé dans le jeu. L’expression tuer le Temps n’a ainsi jamais autant pris tout son sens que sur Hades 2, parfois un peu à tort.

Les Mille Travaux du endgame de Mélinoé
Histoire de pimenter les choses une fois une large partie du contenu d’Hades 2 débloqué, entre en jeu le endgame. On troque alors ici le système de Chaleur du premier épisode pour le Pacte des Occultés. En prêtant différents Serments, comme augmenter la vie des ennemis ou les dégâts qu’ils infligent, cela augmentera l’Obscurité pour la prochaine run, avec en récompense des ressources uniques nécessaires pour obtenir les améliorations ultimes du jeu, voire même atteindre la fin de l’histoire. Un de ces Serments donne par ailleurs une forme alternative à chacun des huit Gardiens des Enfers ou de la Surface, offrant un challenge définitivement relevé.

Même avec une Mélinoé au sommet de sa puissance, certaines combinaisons de Serments vont clairement mettre vos réflexes et vos connaissances à rude épreuve. Ce qui est en soi une très bonne chose, car permet d’agréablement diversifier l’expérience une fois qu’on maîtrise pleinement les mécaniques d’Hades 2. En terminant de telles runs, on tire même une satisfaction presque équivalente au fait de terrasser le boss d’un Souls-like, tant les parties bien chargées en Obscurité peuvent être éreintantes.

À force d’arriver au bout de plusieurs runs dans les Enfers et à la Surface en battant leur boss final respectif, on va donc progressivement avancer vers la conclusion de la quête de Mélinoé. Compte tenu d’un synopsis impliquant de faire face à des forces qui font trembler même tous les dieux de l’Olympe, on pouvait s’attendre à un final absolument épique, digne des récits les plus héroïques d’Homère… n’est-ce pas ? Malheureusement, la fin d’Hades 2 laisse quelque peu sur sa… faim. Sauf que l’aventure ne sera pas tout à fait terminée, puisqu’il restera ensuite une « true ending » à débloquer.
Et c’est là que l’incroyable générosité de Supergiant Games lui fait hélas défaut. Pour débloquer cette fameuse « vraie fin », il faudra en effet encore composer avec une énorme part d’aléatoire qui ternit grandement la recherche de la conclusion de l’aventure. Alors que j’avais déjà une soixantaine de parties à mon actif, j’ai dû pratiquement doubler ce compte en enchaînant des runs « à vide », simplement pour aller à la pêche aux éléments qu’il me fallait pour progresser.
Une fois ce périple assez frustrant arrivé à son terme, j’ai donc enfin pu accéder à cette fameuse « vraie fin » d’Hades 2… qui s’est avérée encore plus décevante que la conclusion du combat de Mélinoé contre Cronos. « Tout ça pour ça ?! », me suis-je alors dit. Une note finale au goût plutôt amer en somme pour un titre qui, mis à part cela, a légitimement sa place parmi les meilleurs rogue-lite de tous les temps. Gageons même qu’il a de solides arguments pour être un sérieux candidat au titre de GOTY 2025. Ultime regret à l’égard d’Hades 2 : cela marque malheureusement la fin de la licence. Déjà au travail sur son prochain jeu, Supergiant Games ne prévoit en effet pas de nous bénir d’une nouvelle aventure centrée sur sa fascinante interprétation de la mythologie grecque.